ébrouer (s')

ébrouer (s')

⇒ÉBROUER (S'), verbe pronom.
A.— [En parlant d'animaux domestiques et princ. du cheval] Éternuer et souffler bruyamment. Derrière le mur, on entendit le cheval s'ébrouer et frapper du sabot (CAMUS, Exil et roy., 1957, p. 1613).
MAN. [En parlant d'un cheval qui fait un ronflement à la vue des objets qui le surprennent ou qui l'effrayent] Les chevaux vifs s'ébrouent facilement (Ac. 1798-1878).
P. métaph. Dans la salle quelqu'un s'ébroua, comme un cheval impatient (CAMUS, Peste, 1947, p. 1295).
P. anal. S'agiter en tous sens, s'ébattre. Le bétail s'ébroue en secouant ses chaînes (BERNANOS, Mouchette, 1937, p. 1329).
P. compar. Comme d'une immense forêt qui s'égoutte et s'ébroue (ARTAUD, Théâtre et double, 1939, p. 69). Parfois la forêt s'égouttait, s'ébrouait comme un animal (LA VARENDE, Trois. jour, 1947, p. 243). Bientôt on entend la machine s'ébrouer comme un vieux cheval (VIALAR, Pt jour, 1947, p. 283) :
1. Elle sentait tous ses muscles s'éveiller et s'ébrouer comme une meute de petits chiens de chasse, vifs et nerveux.
QUENEAU, Pierrot mon ami, 1942, p. 83.
B.— Au fig. Se secouer, s'agiter, comme si l'on sortait d'un état de torpeur ou de repos prolongé.
1. [Le suj. désigne un inanimé concr.] Une automobile en démarrant s'ébrouait avec des pétarades (CHARDONNE, Épithal., Paris, A. Michel, 1951 [1921], p. 65). Un coq chante. Le chêne s'ébroue dans le vent. Ce doit être l'aube. Un fil d'aube terne et gris (GIONO, Colline, 1929, p. 149). Les cheveux de Gaston s'ébrouaient, s'écartaient dans tous les sens (...) le vent les dressait en perruque (LA VARENDE, Centaure de Dieu, 1938, p. 210).
2. [Le suj. désigne une pers.]
a) [L'accent est mis sur l'agitation physique] Elle riait et s'ébrouait avec la grâce dégingandée qu'ont les jeunes filles trop grandes (JAMMES, Clairières, 1906, p. 24). Sortirent du taxi deux longues jambes nues, troussées jusqu'à mi-cuisse, un roulant éclat de rire, puis une grande fille s'ébroua, qui portait un chapeau de toile goudronnée comme ceux des matelots de l'ancienne marine à voile (CENDRAS, Lotiss. ciel, 1949, p. 36) :
2. Nous l'entendions, dans le vestibule, s'ébrouer, gronder, frapper de la semelle.
DUHAMEL, Chronique des Pasquier, Vue de la Terre promise, 1934, p. 9.
b) [L'accent est mis sur l'agitation de l'esprit] Les esprits qui se relèvent et qui s'ébrouent (VALÉRY, Variété II, 1929, p. 58). Les voilà [les radicaux] qui s'ébrouent, parlent en maîtres, tracent de leur propre autorité une ligne de partage parmi les élus de la Nation (MAURIAC, Journal, 1950, p. 164) :
3. Dès 1914, j'ai respiré, je me suis ébroué dans cette œuvre [de Proust] sur laquelle j'ai cru longtemps nourrir des vues personnelles.
MAURIAC, Mémoires intérieurs, 1959, p. 229.
Prononc. et Orth. :[], (je m')ébroue []. Ds Ac. dep. 1762. Étymol. et Hist. 1. a) 1564 esbrouer intrans. « éternuer pour dégager les naseaux (en parlant d'un cheval) » (THIERRY) — 1660, OUDIN Fr.-Esp.; b) 1690 pronom. (FUR.); c) 1762 « souffler bruyamment (d'un cheval effrayé) » (Ac.); 2. av. 1755 d'une pers. (Saint-Simon ds ADAM, p. 105); 3. 1919 d'un oiseau (BENOIT, Atlant., p. 28). Prob. dér. du même rad. germ. que brouet; les parlers norm. ont développé le sens d'« écume qui vient à la bouche des animaux », d'où 1, sens qui s'est ensuite appliqué à l'homme et à d'autres animaux, « secouer (la tête, le corps) » étant devenu la notion dominante (FEW t. 15, 1, pp. 292-293, 299-300). Pour d'autres hyp., cf. Romania t. 67, 1942-43, p. 82 et FEW t. 17, pp. 191-192 (a. b. frq. sprôwan « jaillir » d'où a. fr. esproer « s'ébrouer », XIIIe s. ds GDF. et T.-L., proche d'ébrouer), ainsi que Romania t. 67, pp. 87-89 (orig. onomatopéique). Bbg. BRINKMANN (F.). Metapherstudien... Arch. St. n. Spr. 1876, t. 55, pp. 327-362. — SAIN. Sources t. 2 1972 [1925] p. 8; t. 3 1972 [1930] pp. 35-37.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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